Haut Karabagh

Haut Karabagh: quelques notions à propos de ce territoire (éléments d’histoire contemporaine)

Etant une partie intégrante de l’Azerbaïdjan, le nom de « Haut Karabagh » ne désigne que la partie montagneuse du Karabagh et deviendra une dénomination largement politique, chargée d’un projet très concret depuis la fin de la Première Guerre mondiale.

A cette époque-là, S. Chaduns, un représentant arménien responsable dans le Haut-Karabagh du Comité de pays de Transcaucasie, écrivait le 20 décembre 1922 que «…à cette époque-là, un nouveau terme inventé par les « Dachnaks » – le Haut Karabagh – a été constitué. Après s’être hissés au pouvoir en Arménie, les « Dachnaks ont relancé, une fois de plus, la lutte pour le Haut-Karabagh ». Au lendemain de la soviétisation de l’Arménie, cette lutte s’est poursuivie, conduisant à l’institution d’une région autonome qui sera constituée sur des  terres historiquement azerbaïdjanaises.

Comment a été institué le territoire du Haut-Karabagh, détaché du Karabagh géographique ? Pour répondre à cette question, on doit avoir tout d’abord une représentation complète du territoire du Haut-Karabagh. M. C. Djavanchir (1773- 1853) écrit dans son « Histoire de Karabagh » que « selon les anciens livres historiques, les frontières du Karabagh sont les suivantes : au sud, du pont de Khoudaferine au pont de Synyg, le fleuve Araxe. Maintenant (le pont Synyg) entre Kazakh- Chemseddine et Demirtchi – Hessenli. A l’est, par le fleuve Koura jusqu’au village de Djavad, à sa confluence avec l’Araxe. Au nord, par la rivière Goran à Elisavetpol (Gandja –K.S.) jusqu’au fleuve Koura. A l’ouest, par les hautes  montagnes du Karabagh – Küchbek, Salvarty et Erikli » (« Karabaghnameler (Les lettres de Karabagh) », livre Ier, Bakou 1989). Le khanat de Karabagh a été aboli en 1822 et devient une province de Russie. « Obozreniye », une revue qui paraissait en 1836 à Saint-Petersbourg, présente la superficie et les frontières du Karabagh (13 000 verstes carrés) et souligne que sa superficie est principalement couverte de montagnes. Dans la « Revue des possessions russes dans le Caucase » (III volume, CP6., 1836), A. Skibitski, fils de M.A. Skibitski, scientifique spécialiste du Caucase, a écrit dans son article « La révolte de Caucase » que  « …toute la partie montagneuse du khanat de Karabagh a été appelée le Haut-Karabagh : ce sont les terres à l’est de la chaîne du Karabagh, et à l’ouest du massif du Zenguezour, ainsi que la plaine de Karabagh qui distingue le Haut-Karabagh du Bas- Karabagh ». (Скибицкий А. Карабахский кризис// Союз, 1991, N 7 (Skibickiy A., « La crise du Karabagh », ed. Soyouz, 1991 N 7). Intégrée au territoire de la Russie tsariste, le Karabagh a été soumis à diverses  divisions administratives et son intégrité territoriale a été malmenée. Seulement, pendant la première République démocratique d’Azerbaïdjan qu’on l’a pu rétablir.

Mais, avec l’établissement de la « région autonome du Haut Karabagh (PAHK) » (dans le décret daté 7 juillet 1923 du Comité Central Exécutif de l’Azerbaïdjan, c’est sa nouvelle désignation officielle – K.S.) son intégrité a été à nouveau entièrement violée. Le territoire de la PAHK n’a pas été formé d’une manière scientifique géographique, mais sur la base d’un principe volontariste. C’est-à-dire que ce nouveau découpage administratif a réuni les espaces où résidaient des Arméniens. Il convient à noter qu’en se basant essentiellement sur ce principe, il serait possible d’organiser toute structure administrative et politique en fonction des migrants vivant en masse compacte dans un territoire quelconque ou dans un quartier d’une grande ville. Ainsi, à New York, dans le quartier où vivent les Chinois on pourrait instituer un statut d’autonomie, comme pour les Japonais. Ce changement a été porté à tel point que le village d’Aghdaban, appartenant à la région de Kelbedjer, de Haut Veïselli, dans la région de Fuzouli, ont été inclus à l’intérieur des frontières de la région autonome du Haut-Karabagh, et leur subordination administrative a été changée. D’après la décision de la commission qui avait élaboré le Règlement de la région autonome du Haut-Karabagh (en juillet 1923) plus de 170 villages ont été inclus dans cette région autonome. Le Bureau central des statistiques de l’Azerbaïdjan, a montré que le nombre de ces villages s’élevait à plus de 200 (« le recensement agricole de l’Azerbaïdjan », 1921, volume XVII, Bakou, 1924), mais Q. Kotcharyan en a compté 215 (Kotcharyan Q.A. « Haut Karabagh », Bakou, 1925). Cela prouve qu’en fait la superficie du Haut-Karabagh a été accrue aux dépens d’autres villages.

Ainsi, le concept contenu dans le terme « Haut Karabagh » a une histoire propre  et on voit que son sens complexe est conforme à la politique séparatiste des Arméniens :

1) Ce concept est issu de la pensée politique du parti « Dachnak »;

2) Ce territoire a été formé délibérément non pas sur la base réelle géographique du Haut-Karabagh, mais sur celle d’une priorité donnée aux espaces où vivaient des Arméniens ;

3) A été présenté comme un pays (ce n’est pas par hasard que le Haut-Karabagh est présenté dans les documents internationaux dans sa traduction du russe (« Nagorniy Karabax ») mais sans référence au contexte de sa formation et à son origine soviétique)

4) Conformément à ce projet, sa politisation et l’ethnicisation qui l’accompagne (arménisation) ont été l’objet d’une large gamme d’efforts combinés.

Kerim Chükürov

Docteur en Histoire, Professeur